BARU, Noir.

Publié le par GRAINEDANANAR

 

baru-noir.jpg     Baru (de son vrai nom Hervé Baruléa) était cette année, à 64 ans ou à peu près, le président du festival de BD d'Angoulême, après en avoir reçu deux fois le prix Alph'art du meilleur album en 1991 (pour Le Chemin de l'Amérique) et 1996 (L'Autoroute du soleil) et, déjà, l'Alfred 85 du meilleur premier album pour Quéquettes blues...

      Bref, Baru n'est pas n'importe qui...et ne fait pas n'importe quoi ! Pour s'en convaincre, il suffit de feuilleter, au hasard, l'album Noir, paru chez Castermann en 2009.

      Comme son titre l'indique, l'atmosphère est... noire... Facile, certes. Le graphisme, tout en dégradés de gris, est épuré et dynamique, les tronches expressives, le dessin réaliste pour ces sombres contes de vie et de fureur. Trois histoires composent en effet cet album d'un champion de la bande dessinée contemporaine. Bonne année 2016 peint le tableau redoutable et visionnaire (et en même temps, tellement présent) d'un univers hyper-sécuritaire et xénophobe dans lequel des paumés de banlieue qui sont, selon les mots du président, des « voyous, crapules, racaille apatride, maffiosi et tutti quanti », cantonnés dans leur univers d'exclusion, tentent de voler un peu d'essence et d'arracher un peu de bonheur en allant s'éclater en boîte où ils pourront peut-être « lever une meuf ».

      Dans la même veine, Bonne année 2047 force encore le trait : les banlieusards, enfermés dans leur cité par des murs de béton, surveillés par des miradors, tentent d'y survivre, à la recherche de la capote qui leur permettra de baiser sans choper le sida et organisent des rodéos à mobylette pour passer les barrages au risque de se faire tirer comme des lapins... Celui qui passe remporte la mise, celui qui ne passe pas n'a plus besoin d'argent. Les sommations n'existent plus.

      La Ballade irlandaise qui clôt l'album est un peu à part : il s'agit d'une version très librement adaptée de Roméo et Juliette dans l'Irlande de 1996 sur fond de musique rock – tendance punk. Un conte qui, pour une fois, se termine bien...

Bref, ces trois histoires dessinent le monde effrayant qui est le nôtre dans une satire sans concession qui ne se cache pas : c'est bien la gueule de Sarkozy (au passage, mon correcteur me propose toujours « sardonyx » pour cet individu ; « sardonique » conviendrait mieux...) qui vient se substituer, entre la version initiale de 1995 et celle de 2009, à celle de Le Pen.

Baru, Noir, Castermann « Écritures », 2009, 15

amititi

Publié dans Bédé

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